Enfin !
Un mois avant la reprise des cours de 1963, toutes les étapes de la construction sont encore visibles sur le chantier de Miremont… seul, l’immeuble allongé dit bâtiment B, initialement réservé aux jeunes filles et aux couples, pourra ouvrir ses portes aux 206 premier-es heureux-ses élu-es.
En attendant la mise en service de la tour aux alentours de Pâques 1964, le 1er et le 2e étages ont donc été réservés aux couples et familles et ce ne sont pas moins de 14 bambins qui inaugurent également cette cité. Quatre autres étages ont été presque également répartis entre les jeunes gens et les jeunes filles.
Fidèle aux principes de diversité et d’universalisme chers au professeur Baumann, « la direction s’est préoccupée de rechercher l’égalité sur le plan des nationalités et des races : 50-60% d’étrangers, représentant plus de trente nationalités, et 40-50% de Suisses, dont trois ou quatre Genevois (…). C’est au total 17 facultés et instituts universitaires qui seront représentés à la cité. Il fallut également veiller à ne pas opérer d’injustes, même si elles sont involontaires, discriminations religieuses. La cité comptera donc à peu près autant de catholiques que de protestants, 11 musulmans, 9 orthodoxes, 4 juifs, 1 bouddhiste et 17 étudiants qui n’ont pas indiqué de religion sur leur bulletin d’inscription.
A ces critères d’ordre général, il faut ajouter deux critères d’admission d’ordre plus particulier : la situation sociale et le degré d’urgence d’une part et, de l’autre, le sérieux des études et l’importance du diplôme recherché. »
Journal de Genève, 17.09.1963
Dès le printemps 1964, le reste des locataires prend possession de ses quartiers. Les 420 étudiants et étudiantes, les enfants, la direction et la quinzaine de membres du personnel (aux neuf dixièmes espagnol) prennent leur marque, établissant rapidement un remarquable esprit communautaire.
Aux esprits chagrins qui dénonçaient le luxe inouï de cette Cité, le journaliste rappelle, dans l’émission d’actualité régionale Carrefour, « le point fondamental qu’il ne faut jamais oublier lorsqu’on évoque les problèmes de ces étudiants (…) : chacun de ces jeunes gens représente un investissement à long terme. Ses études coûtent déjà quelque 200'000 francs à l’état mais son rapport futur sera beaucoup plus considérable quand il sera devenu un des cadres de notre économie. La matière grise est une denrée rare qui vaut beaucoup d’argent et qui est une nécessité absolue si nous voulons pouvoir simplement survivre aux bouleversements économiques qui nous attendent. Et il faut se dire que s’il existe quelques étudiants parasites, l’étudiant pauvre est une réalité trop dure et trop répandue pour que l’on ne réagisse pas. Et si l’on veut en arriver à une réelle démocratisation des études qui est vitale pour notre pays, il faut quand même que le plus pauvre puisse vivre décemment, être logé décemment, puisse se nourrir décemment et, malheureusement, malgré tous les efforts entrepris, nous n’en sommes pas encore là. »